Vernissage : Le samedi 7 septembre 2024 de 15 h à 17 h
Sonny Assu : Unintentional Intention
Texte de Sara Trapara
Traduit de l’anglais par Aude Beauchemin
Après une pause de trois ans, Sonny Assu revient de sa résidence d’artiste à l’Institute of American Indian Arts à Santa Fe, au Nouveau-Mexique, avec une nouvelle série d’œuvres vibrantes. La série Unintentional Intention revisite l’iconographie autochtone hard-edge de la côte nord-ouest en la mêlant à des esthétiques occidentales et pop, à l’art du graffiti et au design Memphis, un style emblématique des années 90 caractérisé par des couleurs vives, des formes géométriques et des motifs distinctifs. En tant que membre des Ligwilda’xw des Nations Kwakwaka’wakw, la pratique artistique d’Assu est nourrie par un lien profond avec l’art autochtone millénaire de la côte nord-ouest, ainsi que par son auto-identification en tant que promoteur de la culture pop, amateur de science-fiction et collectionneur de choses nerds.
Assu puise son inspiration dans l’héritage du tagging, qui a émergé dans les années 1990 comme un moyen de marquer le territoire. Au milieu de la peinture qui coule et des tracés dynamiques, Assu insère de manière ludique un mélange de marques erratiques, allant de bonhommes allumettes aux yeux morts à des gribouillis et des traits. Il explore l’une des formes les plus basiques et emblématiques de l’art formline autochtone de la côte nord-ouest : la forme ovoïde, une sorte d’ovale rectangulaire creux, traditionnellement combiné à des formes en S, en U et à d’autres éléments de design pour créer des récits culturellement significatifs. La pratique artistique d’Assu fait évoluer le langage visuel du formline. Ses ovales sont des entités à part entière, tridimensionnelles, qui dominent l’espace de ses peintures. Plusieurs ovales sont dotés de yeux et de bouches – des figures qu’Assu considère comme des « ancêtres » veillant sur les scènes représentées dans les œuvres. Assu mobilise le tag graffiti comme une métaphore de la résurgence de la souveraineté autochtone, un thème récurrent dans son œuvre plus large, dédiée à remettre en question les héritages du colonialisme.
Le penseur Anishinaabe Lawrence Gross nous rappelle que les peuples autochtones ont déjà vécu la destruction de leurs mondes à une échelle apocalyptique. Dans l’ensemble de son oeuvre, Assu démontre comment les modes de vie ancestraux survivent, se transforment et se métamorphosent en de nouveaux terrains d’existence. Alors que certaines œuvres de la série présentent un espace pictural plus plat et abstrait, plusieurs tableaux évoquent des espaces futuristes animés, des ciels apocalyptiques rouges flamboyants et des structures marquées de graffitis. D’autres évoquent des mondes virtuels nostalgiques avec des nuages pixélisés et une iconographie issue du jeu vidéo. Les symboles de cartographie et de navigation, tels que les boussoles, les roues et les vagues, font allusion aux campagnes coloniales qui continent de modifier et de s’approprier les terres autochtones, tandis que le bouclier en cuivre Kwakwaka’wakw se dresse comme un symbole de richesse, d’abondance et de résilience de la tradition ancestrale. La série Unintentional Intention démontre la force de la survie autochtone à travers les générations, en créant des liens avec la culture matérielle contemporaine et en naviguant dans des mondes post-apocalyptiques.