Vernissage : Le samedi 19 juillet 2025 de 15 h à 17 h
Peinture fraîche et nouvelle construction – 21e édition
Artistes : Daniel Allen, Hannah Alsdorf, Mélodie Aubut, Karolina Baker, Jessica Beaugrand, Hadiza Jummai Bello, Raphaelle Bitar, Elias Burns-McKay, Sydney Caldwell, Michaël Côté, Nathan Derome, Armand Diansambu, Shay Donovan, Emily Escoffery, Gabrielle Flynn, Jaurès Goké, Guillaume Harvey, Abtahi Hassan, Yanique Henry, Lida Kamaluddin, Ariane Labbé, Maya Labrie-Collette, Louis-Carl Laplante, Nick Ma, Éric Mailloux, José Lara Menéndez, Karen Miller, Margot Morrish, Mina Moshajjari, Rosalie Mowatt, Mya Naidoo, Fatima Zohra Ouardani, Catherine Lebel Ouellet, Karen Pe’er, Antoine Petit-Viau, Émile Riopel, Paria Shahverdi, Mahir Siraj, Summer Snow, Autumn Star, Zephyr Vulgaris, Grace Way, Célestine Zeller.
Texte de Valeria Márquez Reynoso
Rendez-vous annuel à ne pas manquer, Peinture fraîche et nouvelle construction annonce l’arrivée du beau temps chez Art Mûr. Marquant sa 21e édition, cette exposition collective regroupe le travail de 42 étudiant·es de 11 universités canadiennes. C’est le moment idéal afin de rencontrer les prochaines générations d’artistes d’une côte à l’autre qui marquent leur entrée dans le monde artistique canadien, maintenant regroupées dans un seul espace.
Malgré la multidisciplinarité qui recouvre cette exposition, le thème de l’identité traverse de multiples œuvres. Hadiza Jummai Bello (Campus Grenfell, Memorial University, TNL) explore et défie l’expérience profonde et multiface de l’expérience noire. Elle reprend le contrôle de l’histoire de l’art et amplifie les voix longtemps marginalisées, en s’inspirant des « grands maîtres » afin de présenter la vie d’un point de vue noir et défier les constructions sociales. Parallèlement, Armand Diansambu (Univeristy of Ottawa, ON) utilise le plastique, incarnation de l’effondrement du monde moderne de par sa fragilité et sa toxicité, combiné avec le Wax, représentant sa relation troublée avec le matériau qui se présente en tant qu’africain, mais qui est en réalité un symbole colonial, puis, finalement, avec l’eau en tant que symbole de la mémoire et du deuil. Grâce à ce mélange d’objets et d’histoires, il expose le vertige qui l’habite, soit celui d’exister entre deux mondes en tant qu’originaire de la République Démocratique du Congo, aujourd’hui installé au Canada.
Rosalie Mowatt (Université Laval, QC), quant à elle, souhaite explorer ce qu’elle surnomme sa « culture de création », c’est-à-dire cette identité hybride et complexe en tant que fille d’un père autochtone et d’une mère allochtone. Elle se questionne sur comment faire cohabiter ces deux cultures à l’intérieur d’elle, puis c’est à travers le perlage et le travail du métal qu’elle laisse le passé, son histoire familiale, s’enchevêtrer dans son quotidien. Par la suite, Yanique Henry (University of Regina, SK) utilise la figure de l’île dans son travail pour illustrer son héritage caribéen, mais aussi le manque d’affinité qu’elle approuve face à celui-ci, puis ses tentatives pour renforcer ce lien. Enfin, Lida Kamaluddin (York, ON) aborde la complexité de l’adaptation culturelle, de la mémoire et de la formation identitaire à travers la céramique, rappelant la fragilité et la résistance, des qualités qui représentent l’évolution constante de son identité culturelle.
Un deuxième thème qui revient, est celui de l’éphémérité. Antoine Viau-Petit (Bishop’s University, QC) montre son urgence de capter l’éphémère à travers ses coups de pinceau qui rappellent ceux (post-)impressionnistes. Jessica Beaugrand (University of Manitoba, MB) explore la mémoire, la nostalgie et les moments éphémères. À travers sa peinture réaliste, elle nous invite à apprécier des moments simples que nous tenons pour acquis – tels le craquement du bois d’un feu de camp ou l’air frais d’un soir d’été.
Finalement, la physicalité du médium et la nature sont aussi abordés. Le travail de Maya Labrie-Collette (Concordia University, QC) est nourri par les qualités fortes et malléables des objets qu’elle utilise, créant un sentiment de physicalité, de résilience et de fluidité. La question du contraste lui est importante pour explorer les complexités de l’humanité : que ce soit en jouant avec les paradoxes de la légèreté et de la lourdeur ou de la dureté et de la flexibilité, elle travaille en appréciant la nature des matériaux. Autumn Star (NSCAD University, NÉ) veut faire résonner les émotions visuellement. L’intersection entre féminisme et méthodologie de recherche est incarnée dans son travail, défiant les narrations esthétiques dominantes autour du genre et du pouvoir. La figure humaine a pendant longtemps été champ de bataille en histoire de l’art – idéalisée, objectifiée et contrainte par les regards patriarcaux et coloniaux. Ses « fabrications Frankenstein » (créations avec des déchets – carton, canettes, essuie-tout, etc.) lui permettent de présenter la figure humaine en tant que vaisseau dynamique de multiplicité et de transformation.
Nick Ma (UQÀM, QC) se tourne vers la tension écosophique qui se joue entre les cités et la nature, au ressac de la phénoménologie urbaine et son impact versus l’érosion de la nature – sa résilience, son infiltration, son abandon et son obsolescence. En ayant recours à des matériaux abandonnés, ruinés ou dégradables, il déconstruit et reconstruit des oasis lyriques où l’on peut contempler autant l’érosion que le passage du temps et ses aléas dans une optique écosophique de la contemplation. En dernier lieu, les œuvres de Mya Naidoo (OCAD, ON) présentent sa relation avec le soleil, source de bonheur importante pour elle, et la nature. Elle recrée la sensation de chaque environnement, ainsi que leurs distorsions qui sont en réalité des réflexions de comment un souvenir évolue avec le temps, devenant plus abstrait visuellement tout en maintenant son intensité émotionnelle originelle.
La cohorte de la 21e édition de Peinture fraîche et nouvelle construction continue la tendance de nous surprendre et de nous charmer. Ces étudiant·es ne forment qu’un pourcentage des artistes qui représentent l’effervescence et l’hétérogénéité de l’art canadien de demain, offrant un regard positif sur ce qui attend l’art contemporain.

Karen Miller (Université d’Ottawa)