With Love from Crazy Horse

Du 3 septembre au 22 octobre 2011
Robbie Cornelissen : With Love from Crazy Horse

Texte de Catherine Barnabé

Robbie Cornelissen crée des espaces architecturaux à la fois difficilement pénétrables et inclusifs pour le spectateur. Ce dernier se trouve devant un réseau de lignes et de traits complexe et dense qui crée parfois un effet de repoussoir, alors que le lieu de la toile est comme un enchevêtrement de structures qui n’est pas sans rappeler celui d’un film de science-fiction dans lequel des villes futuristes seraient imagées de la sorte. L’aspect généralement monumental des œuvres crée également cet effet d’espace inclusif, voire immergeant. Les dessins sont exploités de deux façons : fixe, ou en mouvement dans des vidéos d’animation, souvent comme des espaces saturés et toujours comme des lieux vides et sans fin.

Georges Didi-Huberman, dans L’étoilement, conversation avec Hantaï, parle de l’espace de la toile qui est, pour les surréalistes, comme un filet. Un filet dense et composé de ramifications, une structure pleine, un all-over. « L’espace est un filet psychique », dit-il. « C’est, littéralement, un pan. Soit une étendue (…) verticalisée (…) le mot signifie à la fois ce devant quoi nous restons, fascinés, en arrêt, et ce dans quoi quelque chose a été pris ou nous-mêmes pourrions bien nous prendre et tomber comme dans un piège ». Didi-Huberman conçoit l’œuvre comme un espace que le spectateur peut observer ou dans lequel il peut se transposer, un espace singulier et multiple qui happe. Les espaces que crée Cornelissen sont labyrinthiques; des possibilités infinies se présentent devant l’éventuel personnage qui entrerait dans l’œuvre et qui devrait y trouver son chemin. Car on s’imagine tout ce qu’il pourrait y avoir derrière, tout ce qui se cache et qui fait partie de cette architecture. Grâce aux animations, nous pouvons nous y promener, sans avoir toutefois le contrôle du parcours : nous demeurons spectateurs, impuissants.

Les travaux de Cornelissen impliquent un regard différent sur la pratique du dessin, qui crée ici des structures d’une complexité étonnante qui forment par elles-mêmes un imaginaire. On ne peut nier l’influence de Piranesi : on la ressent dans la précision des traits, dans la densité des formes et dans les structures architecturales classiques. Le graveur créait des vues de Rome, des architectures et des prisons imaginaires. Les dessins de Cornelissen se basent sur des éléments classiques, sur une architecture aux proportions justes, équilibrée et simple. C’est l’accumulation, la disposition et les thématiques qui les transportent dans un univers hybride, qui déstabilisent et désorientent. Les dessins noir et blanc sont pris entre différents temps, telle une représentation classique d’un récit futuriste, les ruines d’une histoire inachevée.