What Is to Be Done?

Du 8 septembre au 3 novembre 2012
Vernissage : Le samedi 8 septembre de 15h00 à 17h00
Jinny Yu : What Is to Be Done?

Texte de Catherine Barnabé

Originaire de Séoul, en Corée du Sud, Jinny Yu vit à Ottawa et pratique entre autre à Montréal, à New York, en Italie, au Canada et au Japon. Avec ses plus récentes expérimentations, elle se penche sur la matérialité du support et réfléchit à l’espace pictural traditionnel. Elle explore depuis maintenant cinq ans un créneau particulier qui tend à repositionner la peinture abstraite dans son rapport à l’objet. Elle tente de surpasser les conventions de la peinture en ayant une approche sculpturale de celle-ci, en transférant la matérialité de l’objet à des œuvres de deux dimensions. L’emploi de l’aluminium confère une nouvelle fonction au matériau, en plus de renouveler les qualités physiques de la peinture qui y est appliquée. Ses œuvres, qui oscillent entre la matière et la forme, rappellent une esthétique minimaliste par l’austérité de l’aluminium, mais la peinture révèle la singularité du geste.

Les formes découpées dans l’aluminium sont plus que de simples supports : en les pliant et en les travaillant, Yu affirme leur matérialité et leur statut d’objet, tout comme elle renforce leurs propriétés esthétiques. Le geste qui y est apposé avec la peinture à l’huile emplit les espaces réfléchissants et en souligne d’autres. Il fait voir les nouvelles possibilités de l’aluminium qui, utilisé dans un cadre pictural, révèle des qualités plastiques. Les multiples réflexions que ce matériau provoque sont autant de couches narratives. La lumière, les formes imprécises du lieu se reflètent sur la surface, créant un dialogue. Les gens qui s’attardent devant l’œuvre peuvent y percevoir leurs ombres captées, une narrativité supplémentaire qui s’y greffe brièvement, le temps du passage.

Cette volonté de mettre en espace la peinture peut nous faire penser au processus du sculpteur Bernar Venet qui, dans les années 1970, s’est mis à découper des formes dans de l’acier – d’abord en cernant les contours des formes et des lignes, puis en les détachant de plus en plus du mur pour en faire des sculptures, et finalement en construisant des œuvres d’art public monumentales. Cette réflexion sur le geste et la matière, sur la matérialité du trait, est poussée à son paroxysme chez Venet. Jinny Yu, quant à elle, ne sort pas le geste de son espace pictural, mais détermine un nouveau support qui est lui-même découpé et parfois plié afin de circonscrire de nouvelles limites au trait, de l’encadrer. Les formes découpées dans l’aluminium sortent le cadre de son aspect bidimensionnel, le propulsant vers une nouvelle relation à l’espace d’exposition. Les marques très gestuelles laissées sur l’aluminium font ricochet aux formes du matériau et induisent un certain rapport entre les contraires, dépassant les limites de la peinture mais ne s’inscrivant pas tout à fait dans un travail des volumes.