La récente production de Blatherwick est portée par des préoccupations pour la perméabilité des frontières physiques et virtuelles au sein desquelles évoluent les formes vivantes. Virus, bactéries et parasites sont autant de termes qui s’insèrent dans les registres du microscopique, de l’indéfini, voire de l’invisible, et qui, de surcroît, qualifient les nouveaux dangers bioterroristes et épidémiques. Or, leur traitement plastique, loin de connoter cette sombre menace, se voit insufflé une organicité nouvelle qui renoue avec certains paramètres de l’abstraction lyrique. Masses grouillantes et petites cellules construisent des entrelacs qui ne sont pas sans rappeler les représentations de chaînes d’ADN. Par un principe de composition basé sur l’idée de réseau, les lignes se chevauchent, se gonflent et s’entrecroisent, créant dans l’espace du tableau différents jeux de densité et de trames colorées. Structures organiques et cacophonies chromatiques, les Worm Paintings de Blatherwick déjouent le regard; la possibilité d’en faire une lecture contrôlée est annulée par l’heureuse confusion, à la surface des tableaux, d’impulsions cinétiques d’origines multiples.
La force de l’artiste est de multiplier les références à l’histoire de la peinture abstraite sans jamais adopter de filiation claire, tout en dépassant la problématique classique du rapport support/surface. Là où certains voudraient voir une parenté avec les débuts de l’abstraction lyrique d’un Kandinsky ou avec les moments forts de la peinture gestuelle des années cinquante, s’impose chaque fois une part d’indicible qui se loge dans le pouvoir d’absorption de l’image. Pouvoir qui tire probablement son origine de la manière singulière qu’a Blatherwick de donner vie à sa peinture en privilégiant le non fini, les formes trouvant leur finitude dans l’œil qui les laisse se déployer au gré du plaisir visuel.