Uncommon Ground

Du 11 septembre au 25 octobre 2014
Trevor Kiernander : Uncommon Ground

Texte de Catherine Barnabé

Avec sa plus récente production, Trevor Kiernander pousse plus loin certains concepts propres à l’abstraction qu’il a abordés dans ses œuvres précédentes. Son travail ne remet pas en question ces principes, il ne les redéfinit pas non plus. Il interroge plutôt la matière, la représentation et l’outil pictural, sans toutefois les conceptualiser, et sans non plus idéaliser leur incidence sur les principes de la peinture.

Ses œuvres précédentes se situaient dans un entre-deux, entre abstraction et figuration, elles mettaient en opposition le fond et la forme, oscillaient entre ligne et dessin, composition architecturale et paysage, couleur et géométrie. Cette fois, les références à la nature, au paysage et à l’humain sont pour la plupart évacuées, sinon diluées. Ne se situant pas pour autant dans l’abstraction pure, les récentes peintures de Kiernander sont structurées de façon à créer des espaces sur plusieurs plans où la perspective est pensée comme dans une composition figurative. Des lignes et certains points de fuite rappellent des architectures ou des figures géométriques. Ceux-ci équilibrent les compositions ne permettant pas à la gestualité de prendre le dessus. On sent que, d’un projet à l’autre, ses œuvres se détachent, bien sûr, de la figuration, mais qu’elles s’affirment aussi de plus en plus comme des compositions abstraites où l’espace de l’œuvre et ses formes sont structurés. Il est toujours question de l’espace ; les figures sur l’espace pictural, le rapport des éléments entre eux dans cet espace, l’espace géométrique versus l’espace lyrique.

Dans ses séries des dernières années, les figures semblaient flotter dans un espace indéfini. Ici, on sent qu’elles sont bien ancrées dans la composition et que le fond, toujours de la même teinte, n’est pas qu’un support à une exploration formelle. La gestualité et les formes géométriques, tout comme le fond et la forme, ne sont plus en opposition. Certes, leur proximité crée toujours des contrastes, mais leur rapport semble moins antithétique. Au-delà de ces oppositions, formelles et historiques, Kiernander s’intéresse d’abord à la peinture pour elle-même. Il propose une réflexion sur la forme, la matière et le processus. Pour lui, il est d’abord question de la matérialité de la peinture, puis de la composition qui cerne les figures dans l’espace. Par contre, les titres toujours très évocateurs incitent à une lecture différente : ils ajoutent une tout autre dimension à une première observation. L’abstraction devient soudain moins une question de composition formelle et matérielle qu’un moyen de représenter une idée.